Édito 2019 - Jean-Claude Barens
Cela va faire 25 éditions que le village de Barjac, à travers différents noms de son festival, propose une chanson exigeante et militante.
J’ai eu la chance d’arriver dans une maison où les fondations étaient solides, les murs patiemment montés par des maçons sensibles et exigeants, le toit bien charpenté. Egalement bâtisseur dans l’âme, je ne pouvais apporter ma pierre à l’édifice, qu’en réalisant quelques aménagements plus conformes à ma façon d’habiter le nouvel espace qui se présentait à moi. Des cloisons ont été supprimées, et la création de nouvelles ouvertures a permis une circulation de courants d’airs frais.
Plus de 25 ans dans le rétroviseur, c’est quelques rides supplémentaires en travers de la gueule, c’est quelques petits bourrelets qui se sont installés avec une incroyable perfidie, c'est quelques pelotes de nostalgie qui se nichent au fond du ventre et qu'il convient d'éviter de laisser proliférer sous peine d'appartenance définitive au passé. Il est bien connu que les mots s'envolent et que les aigris restent.
L’édition 2019 sera celle de l’enracinement. Le format voulu est en place, et c’est à nous de faire le nécessaire pour le voir prendre ses aises, vous devenir familier et vous conduire à une réelle appropriation. Cet ensemencement culturel est essentiel, loin de tout saupoudrage et gesticulation de surface, quand souvent sur l’océan des paroles, seule flotte la langue de bois. Ici les chansons comme les cultures doivent se frotter sans friction et les langues de la Terre s'exprimer sans crainte.
Pendant six jours, par mots et par voix, vous entendrez des vers habillés de leur parure mélodique.
Moins de son et plus de sens, loin des mangeoires à images. Vous rencontrerez en chemin, Pierrots lunaires déjantés, ébénistes du verbe ou impénitents impertinents. Mais c’est sur les duetti que nous avons voulu faire un focus. Vous en retrouverez une quinzaine tout au long du festival. Duos sur scène et dans la vie, duos de circonstance, duos éphémères ….le duo laisse une trace, l’empreinte de deux artistes aux tempéraments bien trempés, parfois même opposés et qui pourtant se rejoignent dans une même image.
Du chuchotement à la démesure, longtemps, longtemps après que les poètes aient disparu, les chansons courent encore dans les rues.
Bon Festival !
Jean-Claude Barens
Directeur artistique
(crédit photo Chantal Bou-Hanna).